H. Hilde
Hilde enroule une de ses mèches brunes d'un geste impatient. Les regards qui l'entourent la plongent dans un profond malaise, elle voudrait se lever et leur bander les yeux, à lui, à elle, à tous. Ses yeux à elle semblent perdus quelque part entre l'horizon et les ténèbres, elle contemple ce que les autres ne peuvent pas même entr'apercevoir. Hilde partage sa vie entre les rêves et les désillusions, elle sombre dans des phantasmes quotidiens comme pour nier son existence, comme pour nier sa place parmi eux. Elle se détache petit à petit du monde réel, elle semble même incapable d'émettre un projet réaliste en ce qui concerne son futur. À leurs yeux, elle n'est plus. Mais Hilde déborde d'espoir, un espoir qu'elle ne leur dévoile pas. Recroquevillée au fond d'un fauteuil de cuir de la grande maison familiale glaciale, elle sourit. Elle sent leurs regards, emplis de déception, elle sent leurs pupilles, qui brûlent de la percer. Mais Hilde résiste, elle se doit de résister. Pour elle-même. Leur silence déborde de reproches infinis, la vaste salle semble rétrécie sous la tension qui y règne. Elle ne cèdera pas. Derrière son masque désinvolte, Hilde tremble : de rage ? De peur ? D'impatience ?
Hilde frémit. Le père s'est levé et à présent lui fait face. Elle sait qu'elle devrait baisser la tête, mais quelque chose la retient. Quelque chose qu'elle ne saurait expliquer. Le goût de la désobéissance ? Son mépris ? Hilde affronte le regard du père, son regard d'obsidienne tente maladroitement de défier le regard acier. Déjà ses yeux la brûlent, elle refuse sa faute, elle refuse leur accusation. Les iris de son père frappent comme deux lames, mais Hilde s'empêche de ciller. Alors le père attrape son bras, et lui serre, lui serre comme s'il voulait lui broyer, pour qu'elle hurle. Leur colère alimente sa détermination, leur haine motive sa décision… Hilde ne peut plus pleurer, alors Hilde rit. Pour elle-même. Pour leur résister. Pour exister.
Ecrit par brunhilde, le Jeudi 16 Mars 2006, 20:42 dans la rubrique "Actualités".